Stéphane de Rosnay, directeur d'uN Doigt d'actualité : l'interview par le grain de sable (lettre mail d'Attac)

Le Grain de sable : Comment est né un doigt d'actualité ?

Stéphane de Rosnay : Je travaillais depuis près de trois ans comme pigiste permanent salarié au " Canard enchaîné ". Las de constater que cet hebdo s’enlisait dans le ragot politique et refusait de publier des papiers " méchants " consacrés aux autres médias, j’ai claqué la porte pour créer " UN Doigt " avec deux amis sans aucuns moyens.

Le Grain de sable : Quel public désirez-vous atteindre et que pensez-vous lui apporter ?

Stéphane de Rosnay : Nous ne visons aucune " cible ", n’avons pas effectué la moindre " étude marketing " (quelle horreur !). Nous constatons que nos acheteurs qui nous écrivent, e-mailent et téléphonent en nombre, sont attirés par l’absence de conformisme et de langue de bois du journal. C’est un journal anti-parisianiste, qui tape sur tout et tout le monde, pour le plaisir sans le moindre " ascenseur " à renvoyer à quiconque. C’est ce qui semble séduire nos lecteurs, qui sont à la fois des ados, des lecteurs de quotidiens désabusés et des personnes âgées ravies de constater que la " liberté de la presse " n’est pas complètement morte.

Le Grain de sable : La maquette ressemble au Canard enchaîné. Pourquoi ? N'est-ce pas un handicap ? Comment vous différenciez-vous par rapport au Canard ?

Stéphane de Rosnay : Notre maquette ressemble à celles de centaines de journaux " de jadis ". Nous croyons que la forme importe peu et avons donc opté pour le ringardisme désuet. C’est sans doute un handicap que de ressembler vaguement au " Canard ", hebdo sur le déclin lu exclusivement par des " vieux ". Quant au fond, nous n’avons pas de point commun avec " Le Canard " de 2001 mais nous pensons être ce que devrait être " Le Canard " s’il n’avait si mal vieilli un journal s’attachant avant tout à " décrypter " l’actu à travers sa médiatisation et n’ayant de comptes à rendre à personne. 

Le Grain de sable : Stéphane de Rosnay , quel a été votre parcours avant Un doigt d'actualité ? Quels revues, quels projets avez-vous participé ?

Stéphane de Rosnay : J’ai été publicitaire jusqu’à l’âge de 23 ans. Puis rédac chef adjoint de " 7 à Paris " et de " Lui " (Filipacchi), tout en co-animant des émissions sur Antenne 2 avec Bernard Rapp, " L’Assiette anglaise " et " My Télé Is Rich ". J’ai vécu quatre ans aux Etats-Unis et suis devenu un " spécialiste " des médias anglo-saxons (je lis chaque jour une quarantaine de quotidiens en anglais pour " Le Canard ", cela a été précieux, entre autres lorsque j’étais en charge de la rubrique " Quelle causerie la guerre ", consacrée au conflit du Kosovo). J’ai ensuite fondé et dirigé " Infos du Monde " (Hachette Filipacchi). Puis, détour par le Web, en tant qu’" animateur-vedette " de " La Grand-Messe " sur la chaîne CanalWeb. J’ai travaillé au " Canard " de janvier 1999 à août 2001 (cela est non-exhaustif).

Le Grain de sable : Quel regard portez vous sur la presse aujourd'hui en France ? La presse française est très consensuelle. A quoi est dû ce consensus ? A la publicité ?

Stéphane de Rosnay : La presse française est l’une des plus médiocres du monde (occidental). Depuis fort longtemps. La première explication de cette médiocrité et du consensus (qui n’a rien à voir avec la pub) est historique : en France, les groupes de presse ont été " attribués " à la libération, à des gens qui étaient totalement incompétents. Du coup, il n’y a jamais eu en France de véritables " patrons de presse " Or, c’est un " patron de presse " qui fait un journal et forme des journalistes. La médiocrité, le manque de rigueur et de professionnalisme de bien des canards s’explique (toujours aujourd’hui) par ce fait : il n’y a pas de " patrons de presse " en France donc pas de bons journaux !

Le Grain de sable : A la lecture d'un doigt d'actualité, vous paraissez bien informé. Y a-t-il des infos que vous vous interdisez de publier ?

Stéphane de Rosnay : Nous refusons de nous " intéresser " à la vie privée ! Et refusons donc de publier des informations strictement " privées " C’est tout.

Le Grain de sable : Vous avez sorti "Oussama Magazine", pensez vous continuer dans cette voie très satirique ?

Stéphane de Rosnay : Non. Nous préférons nous concentrer sur " uN Doigt " qui redevient hebdo.

Le Grain de sable : A l'instar de J F Kahn, vous plaigniez-vous aussi de la revue de presse de Pascale Clark sur France-Inter ?

Stéphane de Rosnay : Non. D’abord parce qu’elle n’anime plus la revue de presse. Ensuite parce qu’on ne se plaint pas trop. Jean-François Kahn devrait commencer par faire un truc vaguement lisible avant de râler !

Le Grain de sable : De quel journal vous sentez vous le plus proche : PLPL de Pierre Carles, Charlie-Hebdo, Le Canard Enchaîné ou Jalons ?

Stéphane de Rosnay : Aucun de ceux-là.  Le Canard est dépassé et ringard ; Charlie Hebdo est vieux et sentencieux ; Jalons, c’est fini (et mort) ; quant à PLPL (dont Pierre Carles ne s’occupe plus), c’est un bon fanzine mais très militant, nous faisons un journal d’information.

Le Grain de sable : Pensez-vous que certaines personnes veulent vous empêcher de continuer ?

Stéphane de Rosnay : Evidemment ! Les dirigeants du Canard, par exemple. Et plein d’autres.

Le Grain de sable : Avez-vous les finances solides pour pouvoir continuer ?

Stéphane de Rosnay : Non. On n’a pas de pognon. Mais on continuera.

Le Grain de sable : Merci d'avoir accepté cette interview. 

Aujourd’hui , ce journal n’existe plus et ceci dans l’indifférence totale. La faute à un manque de publicité de la part des autres journalistes. Va savoir pourquoi ?…ndlr

 

Commentaire

On remarque que, au "Canard Enchaîne",ils se refusent de publier quelques articles dit méchants. Donc la liberté de la presse existe t elle?la peur des représailles?

S’il y a un manque de capital, le journal ne peut pas paraître, et peu importe le contenu.

Si la presse ne fait pas la promotion d'un journal, alors celui ci aura de grosses difficultés.

La concurrence peut tuer un journal si celui ci n'est pas puissant

Et d’où vient la puissance ?